Insolite Nancy : des plaques d’égout qui valent de l'or

Hier, l’inauguration d’une plaque d’égout traitée à l’or fin posait le jalon d’un grand-oeuvre à 800.000€
Lysiane GANOUSSE - 16 oct. 2015 à 05:03 | mis à jour le 16 oct. 2015 à 10:41 - Temps de lecture :
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Inutile de se précipiter pour la voler. Certes, cette plaque d’égout inaugurée hier, place Blandan, a bel et bien été rehaussée d’or, ce qui lui vaut le titre de « Rond d’Or ». Mais l’opération n’ajoute que quelques dizaines d’euros à sa valeur. Il s’agit d’abord d’un geste artistique, le 1er jalon du grand-œuvre programmé sur le site Artem. Et qu’inauguraient hier les élus du Grand Nancy en présence des deux artistes porteurs de ce projet au long cours : Michel Blazy et Djamel Kokène.

Deux noms qui reviendront dans notre actu, ils ont été sélectionnés pour donner corps (et âme) à ce qu’on appelle le « 1 % artistique ». Autrement dit ce petit pourcentage du budget consacré au chantier d’Artem à convertir en œuvre d’art, soit tout de même une enveloppe de 800.000€. Pour ce prix-là, d’ici trois ans vont surgir cinq modules et un site internet. Soit une quarantaine de « Ronds d’or », mais aussi un « Vanity Market », qui permettra aux habitants du quartier de régulièrement faire marché de leurs objets d’occasion dans la fameuse verrière et ce, sur des morceaux de tableaux à leur disposition. Surgira par ailleurs « Chair de poule », atelier d’entretien du corps installé dans un poulailler (avec poules pondeuses intégrées !). Un jardin partagé s’ouvrira sous le nom d’« Î les flottantes », et enfin le module « Second Life » abritera des ateliers de réparation d’objets (vélos, électroménagers) chapeautés d’un grenier à ruches d’abeilles.

Bref un projet protéiforme, évolutif, participatif et tout ce qu’il y a de vivant. « Et c’est bien cet aspect collaboratif qui nous a plu », confie François Werner, vice-président du Grand Nancy et à ce titre président du jury chargé de sélectionner le projet final. « Beaucoup de ces réalisations ne pourront se faire que par et pour les gens. De ce point de vue, le Vanity Market me paraît très emblématique, la galerie devient un objet animé en lien avec tout le quartier. Pareil pour le jardin. »

Bref, la proposition répond aux vœux de décideurs désireux de ne pas engloutir 800.000€ dans une simple sculpture monumentale. « En soi une proposition très séduisante », commente l’artiste Michel Blazy. « Une audace rare inscrite dans le cahier des charges : le fait de dire que l’œuvre n’est pas quelque chose qu’on regarde mais quelque chose qu’on active. En plus sur un site inspirant, symbole du décloisonnement des savoirs. »

Hier, il ne leur restait plus qu’à convaincre étudiants et habitants de prendre part à cette néo-utopie faite œuvre. Le premier Rond D’Or est certes posé, mais le reste ne verra le jour (et l’avenir !) que par la grâce de l’engagement de tous.