La période bleue d’E. Macron

23 novembre 2021

Cet automne, une bonne nouvelle, suivie d’une étonnante et d’une autre, carrément stupéfiante. La bonne nous vient de la manufacture de Sèvres, célèbre pour son « bleu » et son  plus grand four à bois du XIXe siècle, classé monument historique : elle a lancé en octobre une cuisson « historique »  nécessitant 33 heures à 1300 degrés, suivi d’un mois de refroidissement ! Depuis 1968, les six fours à bois n’étaient plus utilisés, ringardisés par les cuissons au gaz : il faudra attendre la restauration de 1990 pour que le spectaculaire grand four de 9 mètres de haut reprenne du service en 1999. Il peut cuire des pièces de plus d’un mètre de hauteur, dans un rituel unique au monde, qui n’a lieu que tous les cinq ans et résume  l’essence de Sèvres : unir transmission des savoir-faire et art vivant.  Car Sèvres a donné carte blanche à 3 artistes : Ulla von Brandenburg, Hélène Delprat et Annette Messager pour des créations inédites à partir des formes emblématiques de Sèvres, dont le monumentale vase  Charpin d’un  1,15 mètres de haut.  La première  s’inspire de Nijinski pour évoquer le geste dansé,  la seconde joue sur des figures issues de la mythologie ; Annette Messager place, sur le grand vase Charpin, des silhouettes entrelacées à têtes de mort : ambiance Covid ou référence à la récente disparition de son compagnon, le « grand » artiste  d’AC, Christian Boltanski ? Le public pourra juger du résultat de visu, galerie de Sèvres, à Paris, à partir de février 2022.  

Œuvre plus étonnante, mais aujourd’hui  tout le monde soit artiste, donc pourquoi pas le locataire de l’Elysée : après Picasso, le Président Macron a sa période bleue,  il a décidé d’améliorer le drapeau national et la première de nos couleurs tricolores. C’est le président Giscard d’Estaing qui l’avait précédemment éclaircie pour le rapprocher du bleu du drapeau européen. M. Macron, pourtant un européiste convaincu, préfère le foncer en bleu… marine (ce n’est pas un gag !). Bref, on n’y comprend rien, ça prouve que c’est de l’AC m’a assuré un journaliste. Le changement de couleur ayant eu lieu en pleine pandémie et en catimini (le 13 juillet 2020), on en déduit qu’il y avait urgence d’art.

C’est pourquoi le ministère de la Culture vient de mettre en ligne  « 264 projets artistiques pour des mondes nouveaux », cliquer 264 créations que l’Etat  va aider de nos deniers : pour 30 millions d’euros. L’ensemble est une plongée vertigineuse dans l’art dit « contemporain » le plus récent et mérite un long article (en cours d’écriture) pour en expliquer les arcanes. Observation la plus stupéfiante : sur 264 projets, on constate la disparition des « artistes » traditionnels. Sculpteurs, graveurs, peintres  et même « plasticiens » sont plus ringards que le vieux four à bois de Sèvres. Je n’ai trouvé qu’un seul peintre, encore a-t-il une excuse pour  pratiquer cette vieille technique : Xinyi Cheng est d’origine chinoise.  Les « mondes nouveaux » post-covid commencent donc par faire de la casse dans l’Art, au sens commun du terme. Voilà qui mérite une analyse détaillée et vous serez informés de sa (proche) publication.

Christine Sourgins