Quand la radicalité s’attaque à l’art…

29 novembre 2022

Après Vinci, Van Gogh, Monet et d’autres à venir, ce fut au tour d’une œuvre de Klimt, « Mort et vie », d’être vandalisée « pour la bonne cause », celle du climat. Bizarrement, le milieu de l’Art contemporain, pourtant fort activiste et militant, s’indigne. Or les plasticiens d’AC ne rechignent pas à bousculer le travail d’artistes anciens au sein des musées traditionnels et un Damien Hirst aujourd’hui brûle, sans complexe, des centaines d’œuvres pour les transformer en NFT : le vandalisme d’Art financier serait donc licite et pas le vandalisme écologique ? L’AC confisque la radicalité à son seul profit, de même qu’il admet qu’on le critique mais à condition que le jugement provienne de ses rangs et que le critiqueur y retourne bien vite…

Coté écolos, on s’étonne de cette réprobation en agitant de valeureux ancêtres, les suffragettes du début du XXème siècle, qui subirent prison et gavage forcé (une fois en grève de la faim). Droits des femmes et droit à une planète vivable sont des causes indubitablement justes mais autorisent-elles n’importe quelle protestation, y compris l’iconoclasme ? Fallait-t-il comme Mary Richardson (1889 – 1961) mutiler la Vénus au miroir de Vélasquez, à coups de hachoir, lacérant un des rares nus de la peinture espagnole du XVIIe siècle ? Mary, ex étudiante des beaux-arts (on n’est jamais si bien trahi que par les siens), trompa la vigilance des gardiens en faisant mine de copier des œuvres du musée avant de passer à l’action :  une protestation « genrée » avant la lettre qui lutterait en sus contre la vision masculine du corps féminin, prépondérante en ces lieux.

Parmi les suffragettes, les « casseuses » étaient très minoritaires, la majorité se refusant à ce qui vira au terrorisme, car il y eut aussi des bombes lancées par ces dames, dont une dans un théâtre rempli de spectateurs… comme le rapporte Simon Webb.  Pire, d’après les recherches de cet historien, ces exaltées inventèrent le courrier piégé avec flacons destinés à nuire…Comme quoi, en matière de destruction, la créativité féminine n’a rien à envier à celle du machisme.

La dernière bombe des suffragettes explosa le jour de l’entrée en guerre du Royaume-Uni. 14-18 mis un terme à leur radicalité, pas tout à fait cependant : savez-vous où aboutit l’anti-Vélasquez, Mary, égérie de nos jeunes écolos ? A la British Union of Fascists, oui, à l’union britannique des fascistes…

Nos bébés écolos n’ont cure des leçons de l’histoire car l’histoire a le grand tort d’appartenir à la culture or ces militants proclament fièrement : « nous sommes la nature !». Ce manichéisme, cette opposition frontale Culture / Nature est mortelle car c’est l’harmonie des deux qui seule peut garder l’humanité vivante. On pensait avoir un problème avec la dégradation de la planète mais une calamité peut en cacher une autre…

Christine Sourgins