NB : Pour les parisiens, « Anatomie de la beauté » est déjà disponible à la librairie Boleine, 41 rue de Bourgogne, Paris 7ème. J’y donnerai une conférence-dédicace, illustrée de projections, mercredi 8 octobre à 17h30, gratuite mais sur réservation vu le petit nombre de places : réserver par mail à cap-aristee@orange.fr
Jordan Wolfson est un artiste qui aime l’IA et cela lui réussit : à Bâle cet été (Fondation Beyeler) et à Venise (Ama collection) jusqu’au 3 novembre on peut voir ses travaux qui riment avec robot. Un androïde « fortement sexué », bottes à talons hauts, nuisette, perruque blonde et masque de cuir vénitien, danse devant un miroir ; derrière, une opératrice pianote sur des claviers ; la « danseuse » interagit ainsi avec le public grâce à des logiciels de reconnaissance faciale. L’on s’est vite accoutumé aux performances informatiques, même si, ici, le robot doit son équilibre à la barre d’exercice qui le transverse.
Mais à Bâle, les machines montraient une ambition franchement démiurgique : little room est une cage assez moche, bardée de caméras qui vont scanner les volontaires offrant leur corps à l’AC. Trente minutes plus tard (on imagine une batterie d’opérateurs pianotant sur leurs claviers) : les volontaires casqués découvrent leurs avatars, le leur et ceux de leurs voisins, voisines. Et, ô miracle du numérique et de l’espace virtuel, chacun se retrouve tout à coup dans le corps du voisin ou de la voisine et réciproquement. On sait que l’AC se flatte depuis longtemps d’offrir, non des œuvres d’art au sens « vieillot » d’un objet d’admiration, mais une ex-pé-ri-en-ce ! Il paraît que cette dernière est plutôt « perturbante » aux dires des cobayes ! De quoi accoutumer, voire entraîner chacun.e, a une expérience transgenre, histoire de mettre à jour nos vieux stéréotypes du masculin/ féminin ? On imagine les futures visites scolaires ! Se demander, comme Harry Bellet (1), où est l’intérêt plastique n’est vraiment pas de saison, rétorque l’artiste : « Cela n’a pas d’esthétique, (…) ces œuvres offrent à des personnes des expériences entre leur conscience et leur moi physique ». Un marché immense s’ouvre aux produits dérivés : à l’avenir, « Matrix » sera disponible à domicile, chacun pourra y tester un corps animal, d’alien ou de zombi… et s’entraîner à sa future réincarnation qui sait ! Pas sûr que la santé mentale des ados, friands de ce genre de nouveauté, s’améliore…
Tout cela ne fut possible que grâce à un gros mensonge : prétendre que l’objet d’art, via la contemplation du beau, n’offrait pas une expérience de haute intensité (!) mais juste du plaisant décoratif et qu’il convenait d’y renoncer pour des émotions et concepts plus électrisés ! On voit où nous mène d’avoir abandonné la notion de beauté avec toutes ses implications existentielles !
C’est pourquoi j’ai entrepris une série de livres pour renouer avec l’indispensable beauté, qui serait, nous affirme-t-on, entre ignorance et manipulation, une notion tellement floue, subjective et mineure, qu’on ne pourrait plus rien en dire… « Anatomie de la beauté » sera disponible partout en France le 7 octobre ; le lendemain, à 17h30, conférence-dédicace à la Librairie Boleine, 14 rue de Bourgogne, Paris 7eme, gratuite sur réservation par mail à cap-aristee@orange.fr Découvrir le dossier de presse
A bientôt
Christine Sourgins
(1) « Les robots et les avatars perturbants de J. Wolfson », Le Monde du 26/07/2025.