Reprise des activités (ou des hostilités ?)

14 juin 2021

Ça y est, c’est reparti, l’AC reprend ses petites transgressions entre amis : la Galerie Borghèse de Rome accueille le pied géant et en sandale de Damien Hirst, au milieu des antiques ou des œuvres du Bernin, Canova etc. Cette parodie de sculpture romaine montre, grimpé sur ses orteils de calcaire,  un « rat de laboratoire avec une oreille poussant sur son dos ». Mais l’italien Salvatore Gauru, 67ans et grand spécialiste de l’art du vide, a fait mieux : aux enchères, à Milan, une de ses sculptures invisibles est partie à  14 820 euros, le 18 mai. Une œuvre invisible : pas d’entretien, de restauration, pas d’assurance…une bonne affaire finalement. Le bide retentissant vint du tableau de Monet représentant Dieppe et qui n’a trouvé aucun acheteur malgré un modique  prix de départ d’un million d’euros. Raison invoquée : la covid aurait dissuadé les gros portefeuilles de se déplacer à Montbazon.

Si le dernier rapport de l’Unesco pointe la fragilité des 104 000 musées des 87 États membres (diminution de 70 % de la fréquentation, de 40 à 60 %  des recettes, en moyenne par rapport à 2019), les réouvertures se multiplient après restaurations.  A celle de la Chapelle royale de Versailles (trois ans de chantier et 16 millions d’euros) s’ajoute le musée Carnavalet. Et ce week-end, l’Hôtel de la Marine, place de la Concorde, cet ex garde-meuble de la Couronne était encore occupé par l’état-major de la Marine en  2015. Ce joyau du patrimoine avait failli être vendu à un promoteur pour finir en énième hôtel de luxe. Une bataille homérique le conserva à ses légitimes propriétaires, les citoyens. Sans leur vigilance, cette privatisation éhontée aurait sonné un hallali général contre le patrimoine, tant les financiers ont faim. Architecture de Gabriel, grand escalier de Soufflot, appartements des Intendants (un des plus extraordinaires ensembles de décoration XVIIIème préservé), l’hôtel devenu monument national est sauvé et désormais inaliénable. Prochain défi patrimonial : les travaux de reconstruction de la flèche de la basilique de Saint-Denis débuteront en septembre 2021 pour s’achever en 2028.

J-L Martinez briguait un troisième mandat à la direction du Louvre mais c’est l’actuelle présidente du musée d’Orsay qui a été choisie par l’Elysée. Laurence des Cars a annoncé vouloir créer (enfin !) ce neuvième département consacré à Byzance et aux chrétiens d’Orient.  Le Louvre n’en n’avait pas et surtout, laïcité oblige, n’en voulait guère (les arts de l’Islam ne posant pas problème, eux). Baptisé « Louvre 2030 », le projet de la nouvelle présidente  met en avant l’ouverture à la jeunesse et la vocation universelle du musée. Elle veut en faire « une chambre d’écho de la société ». Houlà, aïe, aïe ! Voilà le biais qui va fournir à l’AC l’occasion d’un retour en fanfare au Louvre. Il paraît qu’à Rome, le pied de Damien Hirst a déjà des fourmis dans les orteils…

Christine Sourgins