Yo Marchand, carnets d’atelier

10 août 2014
« Le temps du regard de Yo Marchand »…
Le principe des carnets d’atelier est simple : demander à un artiste, déjà reconnu, de témoigner de son travail : pourquoi, comment peindre ?


Dans les carnets N°18 des éditions Mémoire Vivante, c’est au tour de Yo Marchand de lever un voile sur son métier de peintre. De peintre abstrait. On connaît ses tableaux-stèles, peuplés de signes mystérieux, ses toiles parcourues de lignes directionnelles telles des portulans, rayées de cordes sensibles comme des lyres silencieuses… Yo raconte sa découverte providentielle du couteau, son goût pour les empâtements, textures, empreintes et collages, comment la pratique de la gravure l’a aidée à progresser… mais elle révèle aussi qu’elle travaille souvent « à quatre pattes », en se souciant des sensations tactiles ou olfactives qui environnent sa peinture. Bref, on découvre un coin du creuset où se mijotent des œuvres alliant le quotidien à une intemporelle géométrie, puisque Yo Marchand aime prélever des fragments « à la une » des journaux pour les insérer en ses damiers de sables et d’ocres : l’ensemble prend l’allure d’un grand jeu dont on cherche les règles…

   Car une œuvre n’accroche  l’œil que pour mieux ralentir le regard ;  voir  demande attention donc patience, qualités qui sont d’abord le lot de l’artiste. Yo Marchand insiste sur la nécessité de la lenteur, des indispensables détours que constituent le recueillement ou la rêverie ; elle en écrit un aphorisme : « Le temps de la peinture est interminable : c’est le temps du regard ».

   Ses années d’expérience la laissent lucide : « Si le métier s’apprend par soi-même, ce qui ne s’apprendra jamais c’est la force de la présence du peintre sur la toile ». Il y a une forme d’ascèse dans sa manière d’envisager l’œuvre peinte avec la quête, âpre parfois, de « l’exactitude ressentie », qui serait un peu l’équivalent de la recherche du mot juste chez l’écrivain. D’ailleurs, le titre de ses travaux est, lui aussi, longuement mûri.

   « Ce goût passionné pour l’art qui doit être renouvelé chaque jour élimine les pessimistes, les tristes, ceux qui n’ont pas la foi » dit-elle. Ces carnets d’atelier sont aussi une profession de foi, en la peinture, en l’abstraction. Voilà un petit vade-mecum pour attendre les prochaines expositions de Yo Marchand, dont une rétrospective à la Corderie Royal de Rochefort, en 2007.

 
Christine Sourgins

Yo Marchand, Carnets d’atelier N°18, Editions Mémoire vivante, 12 rue Lacuée 75012 PARIS    memoirevivante@free.fr

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